Depuis des siècles, les arbres de Noël et l’utilisation de branches de conifères font partie intégrante des célébrations des fêtes. Les cultures anciennes, notamment les Égyptiens, les Chinois et les Hébreux, utilisaient des branches et des couronnes de feuillage persistant dans leurs rituels pour symboliser la vie éternelle. Cette tradition a évolué pour donner naissance à l’arbre de Noël moderne, dont les origines remontent à la Renaissance en Europe. Tout au long de l’histoire, les conifères ont été appréciés pour leur capacité à éloigner les mauvais esprits ou à célébrer Saturne, le dieu de l’agriculture.
Au Québec, la culture des arbres de Noël est devenue une industrie florissante. L’Association des producteurs d’arbres de Noël du Québec (APANQ), créée en 1969, reconnaît la province comme le premier producteur canadien. Collectivement, les producteurs québécois exploitent 8 538 hectares, dont plus de la moitié dans les Cantons de l’Est. En 2020, le Québec a exporté 1 771 944 arbres, générant une valeur totale remarquable de 56,2 millions de dollars – représentant 71 % de toutes les exportations canadiennes d’arbres de Noël, malgré une baisse de 14 % par rapport à 2019, où 2 053 111 arbres ont été expédiés. Ce secteur en plein essor a généré environ 16 millions de dollars de bénéfices cette année-là.
Au milieu de ce succès commercial, notre histoire met en lumière un producteur local du bassin versant du lac Massawippi, Daniel Laflèche. Il y a douze ans, Daniel a déménagé de Hudson et a acheté une propriété à Stanstead-Est d’un producteur qui prenait sa retraite. Désireux d’apprendre le métier, il a effectué un stage d’un an auprès de l’ancien propriétaire. Cependant, l’année suivante, en tant que propriétaire unique, il fait face à un défi qu’il n’avait pas anticipé : pulvériser ses arbres avec des pesticides. Vêtu d’une combinaison, d’un masque et de lunettes de protection, il s’est rapidement rendu compte que ce n’était pas la voie qu’il voulait suivre. Il devait y avoir une meilleure façon, plus saine, de cultiver les arbres de Noël, pour sa propre santé, pour ses voisins et pour l’environnement.
À son grand étonnement, il a découvert que personne d’autre au Québec n’envisageait les méthodes biologiques. Si certains cherchaient des arbres « naturels », ils s’aventuraient souvent dans les bois pour couper un arbre « Charlie Brown ». Déterminé à trouver une solution, Daniel s’est adressé au Mapaq (Ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec) et à ECOCERT, deux organismes qui fournissent des ressources et un soutien inestimables aux agriculteurs. Ecocert est l’un des organismes reconnus pour la certification des producteurs d’aliments biologiques.
Relevant le défi, Daniel s’est associé à ces organisations pour transformer son exploitation en un producteur d’arbres de Noël biologiques écocertifié.
Les arbres de Noël n’étant pas des produits comestibles, Ecocert a dû établir une catégorie spécifique pour eux. Cela leur a permis d’aider Daniel à convertir ses pratiques agricoles pour les aligner sur les méthodes biologiques, y compris les techniques de gestion régénérative des terres. Les inspecteurs du MALPAC ont suivi le processus, mesurant la qualité du sol avant et après, et suivant les progrès de Daniel dans la gestion des insectes et de la fertilisation. Ensemble, ils ont étudié les stratégies efficaces et identifié les domaines nécessitant des recherches plus approfondies.
Les Sapins de l’Estrie
Pratiques biologiques |
Producteurs d’arbres commerciaux
Pratiques non biologiques |
Pas de pesticides : Permettre aux prédateurs naturels de manger les espèces envahissantes Ex. Les coccinelles mangent les pucerons que l’on trouve généralement sur les arbres de Noël. Laisser la nature suivre son cours et trouver un équilibre. Permettre aux oiseaux et aux autres animaux sauvages de trouver de la nourriture. | Utilisation de pesticides : Les pesticides sont régulièrement appliqués, automatiquement ou selon les besoins, éliminant les insectes utiles et réduisant les sources de nourriture pour les oiseaux et autres animaux sauvages. |
Cultures de couverture : La plantation de trèfle et de plantes indigènes entre les rangées d’arbres sert d’engrais naturel et de couverture végétale, aidant les arbres à retenir l’humidité et à développer des systèmes racinaires robustes. | Absence de cultures de couverture et sol exposé : L‘absence de cultures de couverture entraîne la mise à nu du sol et des racines, ce qui augmente le risque de mortalité des arbres pendant les périodes de sécheresse. Les herbicides comme le Roundup tuent toute la végétation, ce qui perturbe l’écosystème. |
Attirer les pollinisateurs : Les cultures de couverture comme le trèfle et la verge d’or attirent les abeilles et d’autres pollinisateurs, favorisant ainsi un écosystème sain. | Déclin des pollinisateurs : Les pesticides déciment les populations d’insectes, y compris les pollinisateurs essentiels, créant ainsi des déséquilibres écologiques. |
Fauchage durable : Une tondeuse à fléau taille les chemins entre les rangées d’arbres, créant ainsi un paillis vert qui enrichit le sol. | Le fauchage destructeur : Les faucheuses rotatives ou les débroussailleuses débroussaillent les chemins et jettent les débris en tas au lieu d’enrichir le sol. |
Engrais naturels : Le fumier de poulet est appliqué directement sur les arbres, ce qui favorise leur croissance sans produits chimiques. | Engrais chimiques : ils sont largement pulvérisés sur les champs, plutôt qu’appliqués directement sur les arbres. |
Préservation du sol : Les nouveaux arbres sont plantés parmi les souches en décomposition, ce qui permet aux micro-organismes du sol de se développer sans perturbation. | Perturbation du sol : L’enlèvement des souches et le travail du sol perturbent les micro-organismes, ce qui nécessite une utilisation accrue d’engrais. |
Daniel donne à ses arbres une taille grossière chaque année pour qu’ils conservent toute leur forme. Il prévoit une évolution de la demande vers des arbres plus petits, plus légers et plus faciles à transporter. Il exporte ses arbres et les vend localement, notamment dans les magasins Avril. Le plus intéressant pour les habitants de la région ? Ils peuvent visiter sa ferme le week-end, de 9 à 16 heures, pour couper leur propre arbre. Il suffit de se munir d’une scie et de ne pas oublier de passer à l’atelier pour offrir une friandise aux enfants !
Actuellement, la ferme des Sapins de l’Estrie compte environ 25 000 arbres. Certains des arbres originaux plantés par l’ancien propriétaire ont été laissés à l’état de forêt. Daniel aperçoit régulièrement des animaux sauvages, notamment des cerfs, des ours et divers oiseaux, ce qui renforce son engagement en faveur de la biodiversité. Il reconnaît que si les arbres de Noël sont un produit non essentiel, ses efforts pour créer un habitat biodiversifié et améliorer la qualité du sol contribuent à capturer le carbone et à apporter une contribution positive à la communauté.
Les Sapins de l’Estrie, 945 chemin Lettre, Stanstead Est, QC [email protected]